Le 5 septembre 2023, un incident a éclaté dans une base militaire française à Faya Largeau, au nord du Tchad, où un infirmier militaire français a tragiquement pris la vie d’un soldat tchadien. Cette base française est présente dans la région depuis quatre décennies, et cette nouvelle a déclenché une manifestation de la population locale devant la base.
La population de Faya rejette catégoriquement toute suggestion de compromis entre la famille de la victime et les forces armées françaises. Dans une déclaration solennelle, la famille met en garde les médias qui diffusent de telles informations, les qualifiant de propagande visant à minimiser le crime, à disculper le criminel et à rejeter toute enquête indépendante.
La question du retrait de l’armée française reste une préoccupation essentielle, et les manifestations populaires persisteront jusqu’à ce que les troupes françaises se retirent définitivement de Faya et, plus largement, du territoire tchadien.
Cette semaine, des Nigériens ont également protesté contre les opérations militaires françaises au Niger. Ce phénomène est devenu monnaie courante en Afrique, avec sept coups d’État en trois ans, la plupart associés à des émeutes populaires contre les bases militaires étrangères.
Il est essentiel de comprendre que l’histoire coloniale de l’Afrique a été marquée par l’implantation de bases militaires étrangères. Ces bases ont joué un rôle significatif dans l’établissement de la colonisation, et aujourd’hui, leur présence continue de susciter l’indignation. Ce que nous observons aujourd’hui, ce sont les descendants de ceux qui ont vécu sous la colonisation, exprimant leur rejet de ces symboles du passé colonial.
Contrairement à d’autres anciennes puissances coloniales telles que l’Angleterre, le Portugal et l’Espagne, qui ont retiré leurs bases militaires après les indépendances, la France a maintenu sa présence à travers ces installations militaires. Jusqu’aux années 1990, des militaires français et des mercenaires ont été impliqués dans des renversements de régimes en Afrique, laissant une impression durable de l’influence française.
Les bases militaires françaises sont devenues un symbole de la persistance de la puissance coloniale sur le continent africain, une forme de colonialisme moderne. La présence militaire équivaut à un contrôle territorial, rappelant aux Africains une époque coloniale révolue. C’est un fait que d’autres puissances, telles que la Chine, l’Algérie et l’Indochine, ont été colonisées mais n’ont pas maintenu de bases militaires étrangères sur leur sol. Les pays comme la Russie, les États-Unis et l’Angleterre s’opposeraient fermement à l’implantation d’une base militaire étrangère sur leur territoire.
La demande de départ des bases militaires peut être interprétée comme la volonté de mettre un terme à une ère de présence coloniale, marquée par la puissance militaire. Cette demande de retrait des bases va de pair avec les appels au départ des ambassadeurs français, remettant en question les relations anciennes et rejetant les interférences et les impositions. C’est une façon de confronter le passé et le présent, en demandant à l’ancienne puissance coloniale de partir.
Alors que les bases militaires s’apprêtent à disparaître, d’autres symboles du passé colonial subsistent, notamment le Franc CFA, le système éducatif colonial, la langue française, le système politique et les religions. La fin des bases militaires pourrait marquer le début d’une nouvelle ère pour l’Afrique, où elle se libère progressivement des vestiges de son passé colonial.