Le 19 avril, les députés togolais ont radicalement transformé la structure politique du pays, faisant passer le régime de semi-présidentiel à parlementaire. Les détails de cette nouvelle constitution, qui reste enveloppée dans le secret le plus strict, resteront dissimulés aux yeux du public jusqu’à ce que le chef de l’État procède à leur promulgation officielle. La nouvelle constitution est critiquée pour son potentiel d’autocratie. Voici quelques-uns de ses articles.
Avec cette nouvelle Constitution, Faure Gnassingbé semble ériger une forme de monarchie. Les prérogatives du Président de la République, telles que redéfinies par la constitution de 1992, ont été réitérées plusieurs fois, pour être appliquées au Président du Conseil, qui ne serait autre que Faure Gnassingbé lui-même. C’est lui qui presque entièrement choisit le fameux Président de la République et nomme les membres du Sénat. Une supercherie. Examinons certains articles de la Constitution à venir.
Article 6 : Sur proposition du Président du Conseil ou sur proposition de l’Assemblée nationale statuant à la majorité absolue de ses membres, le gouvernement soumet tout projet ou toute proposition de loi entrant dans le champ de l’article 17 de la présente Constitution à un référendum, à l’exception des lois de finances, des lois d’amnistie et des garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Un référendum d’initiative populaire portant sur l’objet mentionné au premier alinéa du présent article peut être organisé selon les modalités fixées par une loi organique. L’initiative prend la forme d’une proposition de loi. Elle ne peut avoir pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an. Elle est transmise à la Cour constitutionnelle qui en vérifie la régularité. Lorsque la proposition de loi n’est pas adoptée par le peuple, aucune nouvelle proposition de référendum portant sur le même sujet ne peut être présentée avant deux ans suivant la date du scrutin. Lorsque le référendum aboutit à l’adoption du projet ou de la proposition de loi, le Président du Conseil promulgue la loi dans les quinze jours suivant la proclamation des résultats de la consultation.
Article 10 : Le Sénat est composé des deux tiers de ses membres élus par les représentants des collectivités territoriales et d’un tiers de ses membres désignés par le Président du Conseil. Le mandat des sénateurs est de six ans, renouvelable. Sauf renonciation, les anciens Présidents de la République et les anciens Présidents du Conseil sont sénateurs de droit et à vie. Ils ne peuvent être membres du bureau du Sénat.
Article 12 : Les chambres se réunissent de plein droit en deux sessions ordinaires. La première session ordinaire de l’Assemblée nationale commence le premier mardi du mois d’avril et la deuxième, le premier mardi du mois d’octobre. Chacune des sessions dure trois mois. La première session ordinaire du Sénat débute le premier jeudi du mois d’avril et la deuxième, le premier jeudi du mois d’octobre. Chacune des sessions dure trois mois. Les chambres peuvent être convoquées en session extraordinaire par leur Président sur un ordre du jour déterminé à la demande du Président du Conseil ou de la majorité des membres composant l’Assemblée nationale ou le Sénat.
Article 14 : Chacune des deux chambres adopte son règlement intérieur à la majorité absolue de ses membres. Les séances sont publiques. Toutefois, chaque chambre peut se réunir à huis clos sur demande du Président du Conseil ou de son bureau ou d’un tiers de ses membres.
Article 19 : La déclaration de guerre est autorisée par le Parlement, réuni en Congrès à la demande du Président du Conseil.
Article 22 : L’initiative des lois appartient concurremment aux membres du Parlement et au Président du Conseil. Les premiers élaborent des propositions de loi, le second des projets de loi.
Article 30 : Le budget de l’État, en recettes et en dépenses, est adopté sous forme de loi de finances. L’initiative de la loi de finances appartient au Président du Conseil. Le projet de loi de finances est débattu et voté d’abord par l’Assemblée nationale puis transmis au Sénat selon les conditions prévues par une loi organique.
Article 32 : Les lois définitivement adoptées par l’Assemblée nationale et transmises au gouvernement sont promulguées par le Président du Conseil dans un délai de quinze jours suivant leur adoption.
CHAPITRE II : LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE
Section 1 : De l’élection du Président de la République
Article 35 : Le Président de la République est élu sans débat par le Parlement réuni en Congrès. Après consultation des acteurs politiques et civils, le Président du Conseil soumet les candidatures à la Présidence de la République au bureau de l’Assemblée nationale, tenant lieu de bureau du Congrès. L’élection du Président de la République a lieu au scrutin secret à la majorité absolue. À défaut, le scrutin est repris. Après le troisième tour de scrutin, le Président de la République est élu à la majorité simple des parlementaires votants.
Section 1 : De la désignation du Président du Conseil
Article 47 : À l’issue des élections législatives et après la proclamation des résultats définitifs par la Cour constitutionnelle, le chef de la majorité parlementaire devient de facto le Président du Conseil. Le parti ou la coalition de partis majoritaire transmet par écrit au bureau de l’Assemblée nationale le nom du Président du Conseil pressenti. Le Président de l’Assemblée nationale prend acte de cette désignation et en informe sans délai la plénière. Cette information n’est pas suivie de débat. Avant son entrée en fonction, le Président du Conseil désigné prête serment devant la Cour constitutionnelle. Il forme ensuite le gouvernement. Le Président du Conseil est désigné pour un mandat de six ans.
Article 48 : Pour être désigné à la Présidence du Conseil, il faut être exclusivement de nationalité togolaise de naissance, être âgé de quarante ans révolus à la date de désignation, jouir de tous ses droits civils et politiques, présenter un état général de bien-être physique et mental dûment constaté par trois médecins assermentés désignés par la Cour constitutionnelle, et résider sur le territoire national depuis au moins douze mois. Si le Président du Conseil est membre de l’une des chambres du Parlement, il en démissionne dès sa désignation.
Article 49 : En cas de vacance de la Présidence du Conseil par décès, démission ou empêchement définitif, la Cour constitutionnelle est saisie par le Président de l’Assemblée nationale pour constater la vacance. L’intérim de la Présidence du Conseil est assuré par le Président de l’Assemblée nationale, qui convoque de nouvelles élections législatives dans un délai allant de soixante (60) à quatre-vingt-dix (90) jours.
Section 2 : Des attributions du Président du Conseil
Article 50 : Le Président du Conseil, chef du gouvernement, préside les conseils des ministres, est le chef suprême des armées, dispose de l’administration et exerce l’autorité et le commandement sur les forces armées et les forces de sécurité, détermine et conduit la politique de la nation, définit la politique étrangère et représente l’État dans la conduite des relations internationales, assure l’exécution des lois et exerce le pouvoir réglementaire, nomme aux emplois civils et militaires.
Article 51 : Le Président du Conseil peut prononcer la dissolution de l’Assemblée nationale après consultation de son Président. Il reste en fonction jusqu’à l’investiture de son successeur. Les élections législatives ont lieu dans un délai allant de soixante à quatre-vingt-dix (90) jours. Il ne peut être procédé à une nouvelle dissolution dans l’année qui suit ces élections.
Article 52 : Les actes du Président du Conseil sont contresignés par les ministres chargés de leur exécution.